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Les bouquins : mai 2001



 
 

 
Théâtre / Vladimir Maïakosvki
Grasset (collection Les Cahiers rouges), 1998, 356 p., 64 F
 

couvertureSont réunis ici plusieurs pièces de Vladimir Maïakovski, considéré comme le père de la poésie soviétique : Vladimir Maïakovski datant de 1913, La punaise, Le Mystère-bouffe et La Grande lessive. La première pièce est une tragédie qui met en scène le poète Vladimir Maïakovski comme personnage principal. On trouve aussi des vieux chats noirs et secs, un homme sans tête, la femme petite larme et d'autres personnages aussi étranges. C'est la fête des pauvres et Vladimir se retrouve parmi les gueux. Il se fait le porte-parole de ces sans-voix et la révolte gronde dans les cœurs. Une petite pièce bien bizarre qui doit être bien relue deux fois pour bien en comprendre le sens. En tout cas cette pièce est surtout dénonciatrice (pas de propagande chiante), pas comme les suivantes qui seront plutôt à la gloire du socialisme soviétique comme le Mystère-bouffe. La Punaise est elle aussi assez particulière et laisse derrière elle le théâtre conventionnel que dénonce Maïakovski. Comique avant tout (c'est une comédie !) elle est aussi une dénonciation du petit-bourgeois. Prissipkine qui est devenu Pierre Skripkine pour plus d'élégance en est le personnage principal. Ex-ouvrier, il se marie avec Elzévire Davidovna, manucure et caissière dans un salon de coiffure. Manque de bol le salon brûle alors que la fête célébrant le mariage bat son plein. 60 ans plus tard Prissipkine, congelé, est réveillé par des médecins dans une URSS transformée. Des robots se chargent de voter les décisions, des arbres avec des assiettes contenant des mandarines trônent dans les jardins… Prissipkine apporte malheureusement avec lui sa "maladie" (en fait son univers petit-bourgeois) et une punaise.... Et ce n'est pas triste. Mais le monde "nouveau" décrit a plutôt l'air d'un cauchemar pour moi mais Maïakovski devait le voir comme le monde "parfait" ?. Le Mystère-bouffe lui est encore pire dans le genre grandiloquent et "je lèche les bottes" au socialisme. De la propagande pure avec des purs ( un Négus, un Pacha, un chinois, un Allemand, Clémenceau, un américain..) et à l'opposé des impurs (un mineur, une blanchisseuse, un mécanicien…). Entre les deux un conciliateur mais aussi des diables et des saints et des personnages de la terre promise : marteau, faucille, autos, scie, pain… Plus d'autres personnages. Maïakovski présente cette pièce comme la route vers la révolution (l'action se déroule ainsi dans l'univers, dans l'Arche, en Enfer, au Paradis, aux pays des débris pour finir dans la Terre promise). Reprenant donc des épisodes religieux (le déluge, l'Arche, le Paradis et l'Enfer), l'auteur s'en sert pour s'en éloigner difinitivement (on détruit le Paradis…). Quant aux purs ils sont supplantés par les impurs qui gagnent à force de courage et de persuasion la Terre promise. De bonnes choses donc mais une pièce idéologique qui me barbe quand même. La Grande lessive par contre est "plus délectable" même si la fin est encore axée propagande (ah la foi dans le socialisme…). Cette pièce,  destinée "à lessiver les bureaucrates" me rappelle un roman de Boulgakov (Le Maître et la marguerite). Mais l'auteur qui voulait juste dénoncer les travers de quelques personnes dénonce implicitement tout le système et sa pièce devient acerbe. On y rencontre l'inventeur Tchoudakov, inventeur d'une machine capable d'effectuer un aller-retour dans le futur au prise avec le camarade Pobedonossikov, "dirdécor", directeur principal du service des coordinations. La fin est plutôt conventionnelle mais cette pièce reste assez jubilatoire et intéressante. Donc à boire et à manger dans le théâtre de Maïakovski. En tout cas une bonne approche pour tout ceux et celles qui ne le connaissent pas.

L'OS
 

Les trois chemins / Sergio Garcia et Lewis Trondheim
Delcourt, 2000, 30 p., 55 F

C’est génial.

L’organisation des dessins est grandiose … il n’y a plus de cases, l’espace est libéré.
Il y a trois chemins où débutent trois histoires : celle de John Mc Mac, un homme riche accompagné de son souffre douleur, il veut retrouver celui qui lui doit trois pièces d’or ; celle de Roselita, qui est poursuivie par son nuage qui lui balance des pierres au lieu de lui donner des p’tits pains comme d’habitude  ; celle de H Deuzio, le gentil p’tit robot, qui est coincé sur une barque qui dérive et lui, il voudrait descendre sans tomber dans l’eau.

Les trois chemins se croisent, se croisent à nouveau … d’autres chemins les coupent … alors les personnages se rencontrent … ce qui arrive à l’un fait boule de neige sur les autres … etc … etc …
La lecture est désorganisée, elle parcoure un chemin, elle repart par un autre, par ici, par-là …
La lecture s’organise comme elle l’entend pour suivre l’histoire de chacun, une véritable p’tite gymnastique …

Les personnages ont tous des émotions propres. Le p’tit robot est vraiment gentil, il comprend rien et il se trompe sur les intentions des gens … il va même se prendre pour un super héros … il va trouver ce qu’il ne cherchait pas vraiment, à sa grande joie. Roselita, elle, elle refuse de grandir mais elle sera bien obligée … et elle rencontrera simplement l’amour. Le riche avare finira plutôt mal (et c’est bien fait pour sa gueule) et son souffre douleur trouvera la liberté …
C’est très simple, les gentils gagnent et le méchant sombre. Voilà … du délire, j’adore.

Cette bande dessinée plaira aux grands comme aux petits … il en sort une véritable poésie dans la simplicité des histoires et des dialogues et des dessins tous pleins de couleurs et de joie … et en plus il y a pleins de p’tits à côté qui assurent la bonne humeur, des p’tits dessins de personnages qui n’ont rien à voir avec l’histoire mais qui sont très importants.

De toute façon, c’est du TRONDHEIM, alors : qualité assurée.

QUEMOUL
 

Berck / Gébé
Ed. Gallimard (collection Folio), 1978, 156 p., 36 F
 

couvertureVous ne connaissez pas encore Berck ? Cela rappellera sûrement certaines choses aux anciens lecteurs de Charlie Hebdo où ces planches ont parus. Gébé à cette époque faisait des bonnes choses comme Berck, personnage très bizarre. On nous dit dans le livre que "ses aliments préférés sont les roses, les vieux poissons, les corbeaux crus et le mercurochrome". Côté physique, Berck a l'air mou tout en étant dur, presque invulnérable ; il a un peu la forme d'un pingouin avec un long nez pointu et des yeux immenses. Sa principale occupation est la recherche de nourriture. Facile à faire mais les gens n'aiment pas qu'on leur pique leurs affaires. Mais Berck s'en sort toujours. Joyeux drille, farceur, un côté anar qui n'est pas pour me déplaire, il me rappelle un autre personnage, de Reiser par contre, Gros dégueulasse. Le genre de personnages qui n'ont pas l'air sympathique mais que l'on finit par aimer. Et c'est le cas de Berck (pas Beurck !). 

L'OS
 
 

Ma vie folle / Richard Morgiève
Pauvert, 2000, 155 p., 92 F
 
 

couvertureAvec Richard Morgiève on est en plein dans la fonction cathartique de l'écriture. Ma vie folle est le cri de douleur, le témoignage, l'auto-fiction d'un homme tourmenté par la vie, la mort, l'amour. L'auteur nous livre ici ses états d'âme, sans fioritures, brut de décoffrage pourrait-on dire. Ca déménage... 
Hanté par la perte de ses parents qui sont morts alors qu'il était jeune (sa mère est morte d'un cancer, son père s'est suicidé en mettant la tête dans une gazinière), il écrit pour survivre, pour en finir avec le passé (mais sans s'en séparer), s'accepter dans son corps et s'accepter avec les autres. Richard Morgiève évoque donc des épisodes de son enfance, de sa vie d'adulte (et de la vieillesse), parle de ces femmes qu'il a rencontré, de son fils et de ses enfants, de son homosexualité latente mais surtout de ses parents, de cette mère à laquelle il dédie ce livre. Volonté donc d'une part de faire le "deuil" de ses parents, de les retrouver  ; et volonté d'autre part de retisser les "liens" amoureux avec sa troisième femme qui lui a dit un matin qu'elle l'aime un peu moins. Sentiments, impressions, événements qui sont relatés à travers des paragraphes courts, distendus, une ponctuation presque inexistante, des phrases hachées, arrachées (des fois elles ne finissent pas !), des mots qui martèlent comme ce passage en majuscule après le suicide de son père : "Là je crie de toutes mes forces un cri silencieux mais de toutes mes forces pour chasser la peine pour briser mes chaînes en crêpe noire". Des passages plus calmes viennent reposer le texte comme quand il invoque sa mère : "Et je me tourne vers elle et il me semble que nos regards se rencontrent il me semble que je ne l'ai jamais vue si rayonnante dans son cadre doré". 
Un livre "délivrance" pour l'auteur qui nous fait partager ses sentiments et on se laisse prendre au "jeu", à ce travail d'écriture, à ce "écrire c'est vivre" ou plutôt pour Richard Morgiève à ce  "écrire, c'est vivre un peu plus".

L'OS 
 

Paroles de détenus / sous la direction de Jean-Pierre Guéno
Ed. J'ai Lu (collection Librio), 2000, 189 p., 10 F
 

Nous voilà sur la marelle de la vie, dans les cases de ceux que l’on oublie. Nous voilà dans Paroles de détenus. Ecoutons les complaintes des hommes enfermés, lisons leurs lettres, elles sont les vibrations de leur être.
Ce livre raconte une chute, notre chute, si nous avions trébuché.
Le lecteur devient un prisonnier symbolique. Le voilà enfermé, face à la loi de l’interdiction et de l’obéissance, où on devient « quelque chose ».
Le prisonnier subi l’étroitesse des cellules, le lit en béton, les chiottes crades …
Le prisonnier doit se redécouvrir, découvrir les autres, tout en gardant en lui son passé et notamment certains regards qui hantent. Ici, même l’appréciable devient difficile à vivre. Les visites au parloir peuvent être un véritable choc, c’est un rapport avec le monde extérieur devenu inaccessible. Lorsque les visiteurs repartent, revoilà la solitude. Il faut alors se forcer à penser à l’Avenir lorsque Avenir il y' a. Certains prisonniers ont la possibilité de suivre des études ; certains se réfugient dans la lecture ou l’écriture afin de retrouver une conscience de soi. Sinon le vertige du désespoir est de plus en plus profond et le chaos est immédiat.
L’intimité n’existe pas, la dignité n’existe pas, le suicide, lui, existe.
Ici, tous les prisonniers ne sont pas égaux dans l’enfermement … certains auront des cellules plus grandes ou seront seuls, cela est révoltant car les inégalités du dehors se retrouvent dedans.
« La prison est injuste » comme l’écrit un des détenus.

Paroles de détenus  ouvre les yeux, la lecture de lettres est toujours captivante.
A chacun de se faire son avis face à ces témoignages … le débat est là.
 

NATH
 
 

Peines de mort : histoire et techniques des exécutions capitales des origines à nos jours / Martin Monestier
Le Cherche Midi éditeur (collection Documents), 1997, 301 p., 196 F
 

Strangulation, pendaison, électrocution, noyade, sciage, dépeçage, guillotine... La liste n'est pas exhaustive... et fait froid dans le dos. Ces "techniques" qui donnent la mort ont et sont (pour la plupart) utilisées pour punir des hommes, des femmes, des enfants considérés comme coupables et mériant à ce titre la peine capitale, c'est à dire la mort. Cet ouvrage retrace donc l'histoire de ces peines capitales, de ces supplices : chaque technique est décrite précisemment, son historique est retracé jusqu'à aujourd'hui, le tout agrémenté d'images et de photographies dont certaines sont difficillement supportables. Malgré l'aspect "catalogue de perversions", cet ouvrage est une mine d'informations sur cette verrue qu'est la peine capitale. Les épisodes historiques sont particulièrement enrichissants. Pour ne citer que la France, en 1793, un certain Carrier avait pour mission de mater la révolte des Chouans en Vendée. Ce qu'il fit avec application puisqu'il ordonna la noyade de plus de 5000 personnes en moins de deux mois, enfants et les bébés compris. Il avait même conçu des bateaux spéciaux pour faciliter leur exécution. Les bourreaux sont donc légion et proviennent de tous les pays et continents et continuent à pulluller. Pourtant dans notre monde civilisé on pourrait croire que la peine capitale est en voie de disparition. Que nenni ! Elle est même en progression. Ainsi "la peine capitale reste prévue dans les législations des plus importantes nations du monde", "les neuf dixièmes de l'humanité",  les Etats-Unis étant l' "exemple" le plus médiatisé. Une liste détaillée à la fin du livre des pays qui appliquent la peine de mort et pour quelles accusations est éloquente et montre qu'il y'a encore du chemin à parcourir pour abolir la peine de mort partout dans le monde. Pour en revenir aux USA la dernière "technique présentée est l'injection létale, c'est à dire une injection de barbituriques entraînant la mort et  utilisé dans ce charmant pays. "Dernier cri" en matière de technique elle est considérée par beaucoup comme la plus humaine (sic !). Sauf que comme toute exécution et en dehors des considérations philosophiques ou morales elle n'est pas sure à 100%. En tout cas les médecins qui participent au dosage du produit doivent normalement faire en sorte que leurs patients ne meurent pas. Alors qu'ils font tout le contraire ! Comme le dit si bien la phrase qui conclut ce chapitre sur l'injection : "Les bourreaux en tablier blanc, armés d'une seringue, sont-ils les reflets d'une société de plus en plus civilisée ?" Assurément non.

L'OS
 

Cristal qui songe / Théodore Sturgeon
Ed. J'ai Lu (collection Librio), 1999, 157 p., 10 F

Ce jour là …
Horty, huit ans, est surpris en train de manger des fourmis.
Ce jour là …
sa vie va être totalement bouleversée : son père adoptif va lui broyer trois doigts ; il va fuir … 
il va se réfugier dans un cirque où il devient le compagnon de route d’un nain, de deux naines (Zena et Bunny), de Solum dont la peau était effectivement d’un gris verdâtre, de Gogol : l’homme-poisson, d’un chat à deux pattes (etc) ; il va alors rencontrer le terrible Cannibale qui n’est autre que le patron du cirque.

Ce Cannibale est un personnage vraiment singulier. Il jouit du dégoût que lui inspire l’humanité. Ancien médecin devenu ivrogne, « il crevait de faim, mais comme les richesses matérielles avaient de la valeur aux yeux de ce monde qu’il haïssait, il retirait de sa pauvreté une jouissance supplémentaire » … il avait l’amour de la révolte mais il devient de plus en plus amer … mais épuisé il capitula et se fit « engager dans un laboratoire de biologie où il fut chargé d’analyses cellulaires ». Puis, un jour dans une forêt, il vit deux arbres identiques … alors, il fit la découverte qui bouleversa sa vie … il découvrit « une sorte de cristal » … alors il rechercha sans cesse le moyen d’aboutir à la destruction absolue de l’humanité …

Tels sont les destins, tel est le Roman …

Quel est le lien entre cet homme qui méprise tous les gens, ce jeune enfant prodige qui accumule toutes les connaissances : anatomie, physiologie, littérature, sciences naturelles, histoire, musique … et ce cristal rêveur qui peut pousser des cris silencieux face à une agression psychique.
Quel est le lien ?

Ce roman est vraiment captivant, le lecteur se laisse transporter et il essaye de comprendre l’emboîtement des événements. Les personnages sont très élaborés. Durant ce roman, les rencontres sont multiples et riches en émotions, qu'elles soient positives ou totalement négatives.

Ce p’tit roman de littérature fantastique se lit d’un trait et arriver à comprendre sa conclusion devient, la quête : 
« Si l’individu survit aux dépens du groupe, il met l’espèce en danger. Si le groupe entend survivre aux dépens de l’espèce, il va manifestement au suicide. L’essence du bien et du mal réside là ; c’est de cette source que coule la justice pour l’humanité entière ».

COGITONS.

QUEMOUL
 

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